Présentation de l'infrastructure
Le conseil municipal de la Cité d’Arvida a officiellement initié le projet du pont d’aluminium en 1943, bien qu’il ait été pensé et souhaité dès les débuts d’Arvida. Il a été construit pour raccourcir de près de 5 kilomètres la distance à parcourir pour relier Arvida et la centrale hydroélectrique Shipshaw 2, mais aussi et surtout pour démontrer les forces structurelles de l’aluminium et en faire la promotion. La compagnie Alcan et son laboratoire de recherche amorcent les réflexions. L'aluminium possède plusieurs qualités mécaniques en comparaison avec l’acier, ce qui l’avantage au niveau du transport et de la manipulation des pièces, tout en diminuant les frais de surveillance et d’entretien.
On consulte rapidement l’architecte Harold Lea Fetherstonhaugh et l’architecte paysagiste Frederick Gage Todd, tous deux membres de la Commission d’urbanisme d’Arvida, pour la conception du pont, le choix de l’emplacement et les dessins préliminaires. La compagnie montréalaise Dominion Bridge Company est aussi consultée en 1946 pour valider le modèle de pont à privilégier et exécuter les dessins finaux. En juin 1947, on donne à la Dominion Bridge le contrat de la fabrication et de l’installation du pont, sous la supervision de la firme d’ingénierie-conseil Surveyer, Nenniger et Chênevert, qui devint plus tard SNC-Lavalin.
Le pont d’aluminium d’Arvida est un chef d’œuvre qui a marqué l’histoire du génie civil à l’échelle internationale. C’est le premier pont à longue portée au monde à être entièrement fabriqué d’aluminium. Il témoigne des apports techniques de l’industrie moderne dans la construction et marque une nouvelle ère dans l’usage de l’aluminium. Par son histoire et son envergure, il est l’expression de l’esprit de vision, de travail, d’énergie et de collaboration qui caractérise la cité de l’aluminium. Dès sa construction et encore aujourd’hui, il suscite l’intérêt de la communauté scientifique à travers le monde. Le pont d’aluminium d’Arvida est sans contredits une œuvre magistrale et avant-gardiste de l’ingénierie québécoise.
![]() Bibliothèque et archives nationales du Québec, Fonds du ministère de la Culture et des Communications, photo de Neuville Bazin. E6,S7,SS1,D2,P77697. |
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Reconnaissance patrimoniale
Le pont d’aluminium d’Arvida fait l’objet d’une prestigieuse reconnaissance patrimoniale. En 2005, la Ville de Saguenay l’a cité comme immeuble patrimonial. En 2008, il obtient la désignation de site historique de génie civil par la Société canadienne de génie civil.
En 2023, AMS International (anciennement connue sous le nom d’American Society for Metals) a octroyé au pont d’aluminium d’Arvida le prestigieux statut de monument historique, une distinction également attribuée à des icônes mondiales telles que la Tour Eiffel à Paris et la Statue de la Liberté à New York. Par cette désignation, on positionne le pont parmi les piliers de l’histoire de la découverte, du développement et de la croissance des métaux et de la métallurgie.
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Plan général du pont
À la fin des années 1940, il n’y avait pas beaucoup d’ingénieurs capables d’exécuter les calculs techniques pour les arches de pont. Nenniger, arrivé de Suisse avec des méthodes de calculs novateurs, en fit profiter le pont d’aluminium. Cette méthode permet aux ingénieurs de calculer avec précision et de façon graphique les capacités portantes, ce qui élimine l’excédent de matériaux de construction. Nenniger était l’un des précurseurs de ce domaine de calcul encore tout nouveau au Québec.
Crédit : Ville de Saguenay.
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Route et transport
Pour construire la route qui relie l’actuel boulevard du Saguenay au pont d’aluminium, il a fallu miner 27 000 mètres cubes de roc, enlever 17 000 mètres cubes de terre, percer le roc jusqu’à une profondeur de 11 mètres et remplir un ravin d’une profondeur de 14 mètres.
Crédit : Le lingot, 15 octobre 1948. Croquis du transport d’un transformateur
Le pont d’Arvida a été conçu pour un camion de 20 tonnes qui transporte une charge spéciale de 80 tonnes, ce que représente la livraison d’un transformateur électrique, tel que l’on voit à droite sur la photo de la centrale Chute-à-Caron en 1943.Crédit : Bibliothèque et archives nationales du Canada, e000761082.
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Wagons
Pièces de la structure du pont d’aluminium envoyées par la Dominion Bridge Company de Montréal, ici dans la cour de triage des chemins de fer Nationaux à Arvida. Crédit : (à gauche) Société historique du Saguenay, P002, S07, SS1, P02613-1; (à droite) Arvida Bridge. First Aluminum Highway Bridge in the World. Publié par l’Aluminium Company of Canada, Ltd.
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Derrick de haubanage
En raison du faible poids des pièces de structure, on utilise un transporteur aérien plutôt qu’un pont roulant, formé d’un câble de 1 3/16 de pouce tendu entre deux mâts à treuils érigés sur les butées. S’étendant sur une longueur de 516 pieds, il avait une capacité totale de 21 tonnes.
Crédit : (à gauche) Société historique du Saguenay, P002, S07, SS1, P03500-1; (à droite) Arvida Bridge. First Aluminum Highway Bridge in the World. Publié par l’Aluminium Company of Canada, Ltd.
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Trottoirs - Plan technique
Des segments de trottoir préfabriqués ont simplement été déposés d’un côté sur la dalle de béton du tablier et de l’autre sur les longerons de trottoirs. Cette méthode d’assemblage a provoqué de l’infiltration d’eau qui a causé une détérioration de la dalle de béton et de la structure d’aluminium sous les trottoirs. Il s’agit là du principal défaut de conception du pont. Des travaux de réfection ont été réalisés en 2013; certaines pièces ont été réparées ou remplacées par un alliage d’aluminium avec magnésium et silicium, pour sa résistance à la corrosion.
Crédit : Ville de Saguenay
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Inauguration
Le maire d’Arvida Louis Fay préside la cérémonie d’inauguration du pont d’aluminium le 16 juillet 1950. Le curé de la paroisse Sainte-Thérèse, Joseph Lévêque, procède à la bénédiction du pont. Plusieurs dignitaires y participent, à commencer par le premier ministre du Québec Maurice Duplessis. « La prospérité s’obtient par le travail et la collaboration », exprimait-il. Le président de l’Alcan, Ray Edwin Powell, prend également parole. Plusieurs autres ministres, gérants, présidents, maires et conseillers figurent parmi les invités de marque. La présence de ces individus à l’inauguration est à l’image du symbole que représente le pont en soi, reliant les deux rives du Saguenay : symbole de collaboration entre le capital et le travail, et entre l’autorité civile et religieuse.
Crédit : Ville de Saguenay
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Fabrication des ciseaux
Pour l’inauguration officielle du pont, une paire de ciseaux en aluminium a été offerte au premier ministre du Québec Maurice Duplessis. Elle a nécessité une semaine de travail de soirs par M. Anatole Riverin, inspecteur au département de mécanique de l’Alcan et élève du cours du soir de M. Paul-E. Cardinal à l’École Technique d’Arvida.
Crédit : Le lingot, 27 juillet 1950