Le village et la tragédie
Le glissement de terrain du 4 mai 1971 fit l'objet d'une médiatisation sans précédent partout à travers le pays, et même au-delà. Pourtant, ce que l'on oublie souvent lorsque l'on parle de ce drame, c'est qu'avant cet événement fatidique, le village de Saint-Jean-Vianney était un milieu où il faisait bon vivre.
Le secteur où naîtra Saint-Jean-Vianney possède une histoire passionnante. Dès le milieu du XIXe siècle, le canton Simard attire d'abord quelques entrepreneurs forestiers qui sont rapidement rejoints par un groupe de familles pionnières, dont les Murdock, Duval, Bissonnette, Tremblay, Villeneuve, Saint-Pierre, Boulianne, Blackburn et Gravel. Signe de leur solidarité, ces bâtisseurs se rencontrent à l'occasion pour créer des regroupements agricoles, sociaux ou sportifs, ou encore fournir des services aux familles comme l'électricité et l'eau courante. On tient à se doter de toutes les commodités modernes pour offrir les meilleures conditions possibles aux enfants. Le village a même sa paroisse ainsi que son conseil municipal dans un souci supplémentaire de prendre pleinement sa destinée en main.
L'augmentation de la population du canton, notamment dans les rangs I et II, aura des répercussions au plan religieux. En 1935, le chanoine Joseph Lemieux devient le premier curé de la nouvelle paroisse de Saint-Jean-Vianney. L'arrivée de ce bâtiment galvanise le développement du territoire qui l'entoure. Ce noyau urbain attire les commerçants qui, eux-mêmes, sont de véritables aimants à résidences, à écoles et à commerces. C'est pourquoi, au début des années 1950, le secteur a pris assez de maturité pour devenir autonome. Le 1er janvier 1952, le village est détaché de la paroisse et forme une municipalité appelée officiellement Saint-Jean-Vianney.
Source : Société historique du Saguenay, Fonds Maison de la Presse, FPH50, P06082 | Source : Corporation pour la sauvegarde et la valorisation de Saint-Jean-Vianney |
C'est alors un petit paradis en rapide expansion, du moins jusqu'à cette nuit fatidique de mai 1971 quand un violent glissement de terrain emporte toute une partie du nouveau quartier, coûtant la vie à une trentaine de personnes. Malgré l'arrivée rapide des secours et les efforts des politiciens de tous les niveaux, le constat est sans appel : Saint-Jean-Vianney a été touché en plein cœur et doit être évacué. Pendant quelques semaines, les habitants expatriés ne savent sur quel pied danser entre rester ou quitter pour une municipalité voisine.
Robert Bourassa, le premier ministre du Québec à cette époque, tranche le débat le 27 mai quand il annonce la fermeture définitive du village. Les 1300 habitants devront se loger ailleurs. La plupart se retrouveront à Arvida, dans un nouveau quartier aménagé pour eux appelé le plateau Deschênes, où près de 200 maisons seront déménagées, alors que d'autres se retrouvent à Shipshaw. Des années plus tard, le gouvernement du Québec officialise la fusion des municipalités de Shipshaw et de Saint-Jean-Vianney. Depuis, la nature a graduellement repris ses droits et elle s'amuse à faire disparaître toute trace de ce village. Malgré tout, jamais il ne faudra oublier que 31 personnes ont perdu la vie et 42 maisons ont été détruites lors de cette fameuse nuit de mai 1971.
Source : Corporation pour la sauvegarde et la valorisation de Saint-Jean-Vianney | Source : Corporation pour la sauvegarde et la valorisation de Saint-Jean-Vianney |